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Les Buissonnières voient jaune!


Année 2019,

année du neuf !



La maison de l’écriture vous souhaite une belle année, joyeuse et fertile en écritures!

Pour la commencer sous le signe du renouveau, du phénomène inattendu, nous avons choisi de placer cette première émission de l’année sous le signe de LA couleur d’actualité : le jaune !

Pourtant nous sommes au cœur de l’hiver. Or le jaune est par essence couleur solaire, celle des blés mûrs et des moissons, bien qu’il puisse se nuancer d’une touche d’acidité, en parant par exemple la peau du citron.

Son apparente simplicité n’est d’ailleurs pas dépourvue d’ambiguïté : il est aussi la couleur de l’infamie. Le jaune a été la couleur des cocus, au temps où cette situation était tenue pour rare et la fidélité entre époux une valeur aussi solide que la retraite ou la sécurité sociale.

Le jaune a pris une signification douloureuse au cours de l’histoire humaine : jaune était la couleur de la rouelle imposée aux juifs par les chrétiens à la suite du concile de Latran en 1215, puis de l’étoile par laquelle les nazis, en 1941, ont voulu les stigmatiser avant que l’infamie leur revienne en pleine figure, associée à une succession d’atrocités qui ont dépassé en horreur tout ce que les mémoires avaient enregistré jusqu’alors.

De l’ambre aux gants beurre frais, attributs des fils de famille pour demander à papa la main de leur belle, du délectable vin jaune du Jura au bec jaune des merles, devenu béjaune pour se moquer des niais, du nain jaune qui a dévoré bien des fortunes à l’insulte – espèce de jaune ! C’est un jaune celui-là ! – flétrissant les briseurs de grève, le jaune s’est moiré de mille évocations avant de devenir, un beau jour de novembre 2018, la couleur d’une tempête dont nul ne peut prédire l’issue.

C’est pourquoi nous avons posté sur les réseaux notre invitation à écrire afin que les gilets jaunes fassent entendre ici leurs voix, une voix différente de celle de la revendication, une voix poétique qui prouve à qui veut l’entendre que tout le monde peut écrire, et que la sensibilité n’est pas l’apanage des diplômés.



Les Buissonnières, une émission présentée par Corinne Hyafil, Virginie Lou-Nony et Hélène Tallon-Vanérian, avec la participation exceptionnelle de Juliette Blanc, Gilet jaune au rond-point Peugeot de Bédarieux.





Phot-oméga

Thérèse Testot


Il fait un temps jaune

d’Afrique du Sud

dit le boulanger

qui s’y connaît


Consent la tornade

à traverser l’océan

les fuseaux horaires

soulever le désert


Grand-Mère Claire

va et vient

sur le perron

n’aime pas ce ciel-là


Qui va tomber aujourd’hui ?


Les poules se sont rentrées

toutes seules

serrées sur le perchoir

les unes contre les autres


Le coq crâne

Jaune étouffe

d’un soufre brûlé

les nuages habituels

déchire le soleil

en lambeaux

de fin du monde.



Scènes de vie

Ezechiel Délices

Jaune tic-tac de la femelle écureuil qui fait des spirales autour du tronc de l'arbre, sa queue fouettant l'air comme une main cherchant à saisir le sable fuyant entre les doigts.

Jaune tic-tac de la fillette assise devant le portail de l'école attendant sa mère, son menton dans ses paumes, son cartable licorne à ses pieds.

Jaune tic-tac après la pluie, se dessine l'arc-en-ciel gris ; pluie de fin d'après-midi d'automne, avec cette douce saveur colorée de lait anisé et du métal frappé au fond de la forge.

Jaune tic-tac de ce corbeau obèse qui toise le pigeon boiteux et lui chourave son morceau de pain. Gauche il est, à courir poursuivi par le pigeon pestant pour récupérer sa pitance !

Jaune tic-tac du bip bip de la machine qui vomit les billets dès lors qu'on a composé le bon code. Entendre un rire à côté de soi, avec le z'auriez pas une petite pièce ? du punk, grosses bagouses, veste militaire, jean troué, piercings aux oreilles et au nez, coq sans ergots avec sa crête gominée.

Jaune tic-tac de ce parfum que tu discernes au loin venir à toi, de ces mains qui se posent sur tes yeux doucement. Feuille jaunie de l’arrivée apathique de l’hiver au dessus de l'eau. Sentir cette chaleur en toi comme si ton cœur était en fusion, volcan organique.

Jaune tic-tac de la ronde des filles après le match, contentes de la victoire.

Jaune tic-tac, crépitement des brasiers en ville, feux de joie sans joie, feux d’espoir des uns feux de lassitude des autres.

Jaune tic-tac des nuits blanches à chercher une présence qui s'est évanouie dans la noirceur silencieuse du lit.

Jaune tic-tac du réveille-matin avec le fracas matinal et le bip mécanique du camion poubelle, des voix profondes et sonores des hommes-moissonneurs de déchets.

Jaune tic-tac du glas qui précède le retour à la terre, cortège noir de monde slalomant entre les cabanes mortuaires des résidents du cimetière : suicide.

Jaune tic-tac, ritournelle des jours, des semaines, des mois, des années qui vont et viennent comme l’été ou l’hiver, comme la soif ou la faim, comme la mort et la vie.

*


Demain départ à la mer, j’entends déjà le bruit des vagues déferlant sur les rochers. Il ne me manque qu’un ciré et des bottes. Je monte au grenier quatre à quatre en espérant y trouver mon bonheur. J’ouvre la porte à toute volée et oh non, j’avais oublié que la poutre était si basse ! Je me cogne de plein front à ce morceau de bois dur comme... du bois. La douleur m’assaille violemment. Je m’accroupis sur sol, la tête entre les mains. Je sens sous mes doigts une bosse énorme. Je peste, je fulmine, je me mords la main pour contrer la douleur. Mon crâne résonne comme une cloche gigantesque faisant jouer des harmoniques dissonantes. Toute groggy, je tente de relever la tête, espérant faire cesser cette musique diabolique qui me scie l’occiput ! Je bouge mon cou à droite à gauche pour vérifier que les cervicales sont intactes et, à gauche, justement, en diagonale de mon strabisme, une pelote de coton jauni recroquevillée me fait de l’œil. Je cligne des yeux pour faire disparaître l’hallucination. La pelote est toujours là. Elle est de la taille d’une balle de tennis, son jaune est pâle comme un matin de brume. De cette sphère décoiffée s’échappent de petits brins de fibres. Je la saisis. Elle est douce dans le creux de ma main. Elle pèse lourd, bien plus lourd que son image me donnait à penser. De quoi est-elle lourde ? De quels secrets, de quelles histoires, de quels mystères le temps l’a-t-il engrossée ? Les fibres qui s’échappent lui donnent, selon les rayons de lumière qui viennent l’éclairer, des formes de statues variées et magnifiques ! J’y vois la silhouette d’une femme enceinte, portant fièrement son ventre ballon. Ou encore un guerrier partant, sa lance en avant, chasser quelques ennemis imaginaires ou tout simplement quelques animaux pour nourrir la tribu.

La boule se fait de plus en plus lourde. Les images sont-elles en train de devenir réalité ? De prendre racine dans cette sphère jaunie par le temps, dans ce petit ballot de coton filé par des doigts qui depuis longtemps ont quitté notre terre ?

Ma tête résonne encore de la dureté de la poutre, mais la découverte est trop belle et mérite que je m’oublie. Je prends mes deux mains pour supporter le poids de cet objet vivant. Des fourmillements me montent jusqu’en haut des épaules, jusqu’à sentir des frémissements le long de ma nuque. Le petit ballot crisse d’énergie. Réveillés par ma chaleur, tous ces fils, trop longtemps privés de vie, se remettent à vivre et prennent une teinte dorée. Je me rêve tissant de ces brins frémissants une étoffe mouvante, une écharpe volante offrant de voyager à quiconque porterait autour du cou ou de la taille ce morceau de tissu. Ou plutôt une taie d’oreiller pour que chaque rêve nous emporte dans des mondes parallèles ou alors des chaussettes de 7 lieux pour gravir les montagnes ?

Mais comment tisser une étoffe à partir de ces fils de coton jaunis ? Petite, j’ai eu un métier à tisser que j’adorais, mais je ne l’ai jamais revu. Qu’est il devenu? Du bois de chauffage ? A-t-il fini sa vie dans une déchetterie quelconque, jeté par des adeptes du vide angoissés par le trop plein d’objets ? A-t-il été condamné à une mort certaine par ceux qui n’ont pas compris que les objets, eux aussi, ont une âme ?

Je tire délicatement un petit brin hirsute sortant de la pelote comme un poussin de l’œuf. Le fil est lourd, impossible à détacher. La boule refuse de se défaire, de se partager, de se dévider. J’insiste. Elle devient acier, ses fibres hirsutes se rétractent. La[VLou2] boule m’interdit d’intervenir sur son entité et me ramène à ma condition d’étranger découvrant un trésor dont il n’a pas la clef.

Je repose la sphère. Subitement ce n’est plus qu’un ballot terne dont la lumière a disparu. Le jaune redevient pâle, puis translucide. La boule se désagrège devant mes yeux. Elle tombe en poussière. Il ne me reste plus que de la poussière, de la poussière de temps. Je prends cette poussière sur mon doigt et dessine sur mon front des traits ancestraux. La douleur s’estompe, la bosse s’amenuise puis disparaît. C’était là son secret, son trésor, mon baume de guérison. Le coton est une fleur qui n’obéit qu’à ses propres lois.

*


Marcel Proust à 29 ans

Couleur éclatante associée à la richesse, le jaune attire l’œil et les peintres n’ont pas manqué de jouer sur cette particularité – tout le monde se souvient des jaunes de Van Gogh, celui des blés et des tournesols, celui du café sur la place ou des lumières reflétées dans le Rhône.

Dans un passage célèbre de La recherche du temps perdu, Proust associe la révélation d’un petit pan de mur jaune dans une œuvre du peintre hollandais Vermeer à une illumination ultime de l’écrivain Bergotte, l’un des héros de cette œuvre immense.

Après un déjeuner de pommes de terre, l’écrivain se rend à l’exposition où est accroché le Vermeer, qu’il se rappelait plus éclatant, (…) Il remarqua pour la première fois des petits personnages en bleu, que le sable était rose, et enfin la précieuse matière du tout petit pan de mur jaune.

Ses étourdissements augmentaient ; il attachait son regard, comme un enfant à un papillon jaune qu’il veut saisir, au précieux petit pan de mur. « C’est ainsi que j’aurais dû écrire, disait-il. Mes derniers livres sont trop secs, il aurait fallu passer plusieurs couches de couleur, rendre ma phrase en elle-même précieuse, comme ce petit pan de mur jaune ».

Après cette révélation, Bergotte s’abat et meurt devant le tableau.



La petite feuille jaune

Cette nuit le vent d’hiver a chassé impitoyablement l’automne de mon jardin.

Devant ma fenêtre le cerisier a triste mine dans l’impudeur de sa nudité.

Mon regard est attiré inexorablement par une petite feuille jaune, la dernière, qui refuse courageusement de quitter son arbre. Solitaire et fragile dans cet environnement de branches enchevêtrées, elle rayonne dans sa parure d’or comme si elle m’attendait pour me saluer avant de disparaître.

Le jaune de sa robe sécrète l’énergie, la lumière et la chaleur des premiers rayons de soleil printaniers, annonciateurs des beaux jours à venir, avec le temps des blés mûrs et des moissons. Loin des ardeurs du rouge ou de la froideur du bleu, le jaune apporte du bien-être dans notre vie.

Les tournesols, fidèles adorateurs du soleil, ont compris la dimension du sacré qu’il implique, car si le jaune est signe de richesses matérielles, il est aussi signe de richesses culturelles et spirituelles. On le retrouve en abondance dans la culture russe qui, après avoir été longtemps reniée, est actuellement réhabilitée par la restauration de ses palais dorés et de ses icônes à vénérer.

Pour moi, le jaune restera à jamais rattaché à la découverte d’un tableau du peintre Abdallah Bénanteur découvert à l’Institut du Monde Arabe à Paris.

Je suis entrée d’emblée dans cette œuvre, happée par l’émergence d’une lumière mystérieuse qui s’imposait. Il s’agissait d’une toile monochrome se déclinant dans des nuances subtiles de jaune qui portaient en elles toutes les caractéristiques du désert, résumées dans son titre : « Terre d’or ».

Il émanait d’elle une vibration si intense que son silence palpitait en moi. L’air était chargé d’une présence sacrée et j’osais à peine respirer de crainte d’interrompre l’instant magique qui célébrait cet ailleurs inaccessible tissé dans mes fibres.

Dans un état bienheureux de semi-conscience, comme hypnotisée, j’explorais de nouveaux chemins, me laissant absorber par cette terre inconnue ; je devenais tour à tour poussière d’ocre ou lumière dorée.

Ce n’est qu’en émergeant à l’air libre que j’ai pu revenir à la réalité et j’ai eu alors l’impression que je rentrais d’un long et merveilleux voyage.

Il a suffit d’une petite feuille jaune pour raviver ce souvenir.

Alors je l’ai cueillie avec précautions, et je l’ai glissée entre les pages d’un livre afin qu’elle ne devienne pas une feuille morte anonyme mais reste à jamais « La petite feuille jaune ».


*


Juliette Blanc

Le jaune de l’éblouissement, de la révélation, nous conduit à ce jaune du surgissement soudain d’une réalité sociale, celle des gilets.

Juliette, qui a pris contact avec la maison de l’écriture lorsque nous avons posté l’invitation à écrire pour nos Buissonnières de janvier sur les pages Facebook des Gilets jaunes, participe à l'émission.


Jaune,

jaune comme cette levée de dignité au coeur des gilets jaunes,

jaune comme cette chance d’évolution que chacun donne au groupe,

jaune comme ces gilets jaunes qui remettent à leur place les droits fondamentaux de tous les citoyens, qui relève avec courage le niveau de vie,

jaune comme tous ces gilets jaune réunis, unis dans le respect des différences,

dans ce jaune tant de sourires gratuits, qui n’ont pas de territoires à dominer, ni personne à exclure,

dans ce jaune tant de larmes, de sang, d’humiliations, de cris et d’injustice,

tous ces gilets jaunes pour sortir de l’asservissement, de la lâcheté, de la provocation, de la survie qui donne toujours pouvoir aux mêmes.

Nous ne voulons pas de ce pouvoir, sous quelque forme que ce soit,

passons à autre chose, comme la dignité dans ce jaune qui n’a rien à prouver

rien à cacher

rien à envier

rien à vendre

rien à prouver

personne à acheter

personne à renier

rien à imposer

tant à reconnaître

rien à juger

rien à posséder

personne à dominer

rien à maîtriser

rien à garder

rien à savoir

tout à découvrir

tant à aimer,

tant à partager, tous égaux en droits.

Voilà ce que ce mouvement plein de générosité et d’humanité offre à tous :

la liberté de vivre ensemble, simplement.

Obliger le peuple à se battre pour cela en 2018 est un sérieux retours aux temps féodaux...

Jaune comme tous ces gens honnêtes qui n’ont pas besoin de hautes études pour être parfaitement intelligents et pleins de bon sens ;

gens honnêtes volontairement provoqués, insultés, attaqués puis acculés et accusées.

Malgré le mépris gouvernemental, malgré son immaturité assassine, nous, gilets jaunes avec le monde, ses beautés, ses vérités et tant de simplicité, nous effacerons sur le sable les misères tracées sans donner plus longtemps le sang de nos proches .

Alors oui,

comme une ouverture

une faille dans l’impossible

avec tous ces gilets jaunes, une 3ème voie n’a pas d’autre choix qu’exister

ni supérieure

ni inférieure

ni large

ni étroite

ni soumise

ni aux ordres

juste là, vivante

don d’amour qui laisse armes et combats tomber d’eux mêmes dans cette générosité absolue

juste une infinie ouverture au monde qui n’a d’autre choix qu’épanouir celui-ci dans les grâces des insondables,

C’est pas facile

c’est réalisable ,

maintenant !

On lâche rien !

Les caprices meurtriers des élus ont assez duré, on lâche rien tant que nous ne sommes pas tous libres de vivre sans esclavage. Le temps du tout argent et de l’exploitation ont signé leur fin d’eux-mêmes !

*


Pascalette en stage à la Maison de l'écriture

Pascalette, qui vit avec une maladie génétique rare, invalidante et parfois douloureuse, ne peut qu’être de tout son corps sensible aux protestations contre les mesures d’austérité touchant les allocataires handicapés et les hôpitaux.





Jaune

Jaune comme symbole de cette masse, des anonymes d’abord silencieux, solitaires, désemparés puis déterminés, qui se sont retrouvés un jour unis, sans slogan, sans parti politique, sans syndicat ;

jaune fluorescent comme ce gilet porté fièrement, par des individus enfin rassemblés pour une même cause : n’être plus des invisibles, des moins que riens, des qui sont juste là pour nourrir le système des multinationales ;

jaunes comme les lucioles dans la nuit hivernale, glaciale, ces femmes courageuses, debout, qui investissent les rond-points, les péages d'autoroutes, les points stratégiques, pour être enfin visibles et déranger les nantis ;

jaune comme la bile devenue toxique en ces temps où les inégalités réelles ou ressenties par le plus grand nombre font que le peuple brandit son mal être, ses maladies, ses névroses, ses frustrations ;

jaune comme le danger, cette colère trop longtemps rentrée, ces points trop longtemps serrés au fond des poches, ces mots trop longtemps coincés dans la gorge qui finissent par sortir comme des crachats à la gueule des puissants ;

jaune pour signifier l'arrêt, le stop de la vie économique, ces friday, ces soldes et promotions affichées sur fond jaune, comme des slogans, intégrées comme des injonctions à la consommation, ultime illusion ;

jaune comme le vomi déversé sur la place publique, ce trop plein qui inonde les pavés : le ras le bol fiscal, la bagnole qu’il faudra changer, les boulots précaires, les loyers qui flambent, et le mépris d'un président ;

jaune comme une multitude de revendications, lancées comme des éclairs, des flash dans la nuit qui aveuglent les dirigeants, les technocrates, les décideurs, les experts ;

jaune comme ces héros ordinaires, qui par la force des choses, se sont donnés rendez-vous, prêts à en découdre ou à changer le monde ;

jaune comme la couleur de l’espoir, dernier bras d’honneur ou dernière chance avant le black-out. À vous de décider.

Alors oui, le jaune comme la couleur du changement, un nouveau printemps pour ces âmes délaissées, maltraitées ;

jaune pour de nouvelles résistances, jaune comme les tournesols, capitules résolument tournés vers le ciel, pour une nouvelle citoyenneté.

Et pourquoi pas des gilets arc-en-ciel ? Pour tous les autres exclus, ceux qui ne se sentent pas le droit de porter un gilet jaune ?

Des gilets de toutes les couleurs pour tous les oubliés de la globalisation.

*

Nous est venu du Gard le texte d’Editha Scott, impliquée dans le mouvement des GJ, et qui sous un nom plus français œuvre aux activités de l’excellente Université Populaire du Grand Alès. (Coco)

Un froid d’hiver a gagné les sillons, vidant nos escarcelles avec des pinces à fric. L’argent se débobine et cela fait des nœuds : de paysans, de pêcheurs, de brodeuses à la chaîne, de cheveux, de colère…

Une cordée solide d’unis aux coudées franches, qui vitupèrent sous le même drapeau. L’objectif prudemment est resté à l’abri derrière ses boucliers. Car enfin, depuis trois décennies, les trois-quart du butin vont bien à ceux qui « pensent », leurs miettes jusqu’alors suffisaient aux « pigeons » de tout poil qui osent regimber sur le haut du pavé !

Certes l’humeur n’est pas encore aux jonquilles, ni au temps des cerises. Cela viendra peut-être. Un jour, comme un oiseau, chante Aragon, tandis que le jaune des gilets vitamine les ronds-points du pays.

*



Hélène Tallon-Vanérian

OUI

Magali François, lue par Hélène



Jaune,

Chaleur, Douceur, Lumière.

Jaune,

Trahison, Mensonge, Tromperie.

Jaune,

Comme le bouquet de tulipes posé sur la table,

Jaune,

Comme un aveu d’impuissance,

Une confession d’amour,

Un besoin de pardon.

Jaune,

Comme mon œil après son poing.

Jaune,

Comme des souvenirs en désordre,

Le champ de boutons d’or ondulant dans le vent,

La paille ébouriffant les jeux d’enfants,

Les citrons égayant le verger,

L’or pétillant au fond de ses yeux,

Les tournesols s’offrant à la caresse du soleil,

La boîte à lettres attendant l’amour,

Le curry embaumant la cuisine,

Le pull attirant le regard dans la vitrine.

Jaune,

Comme mon rire qui vole en éclats,

Ses bras autour de moi.

Jaune,

Comme un immense Oui,

Une nouvelle chance.

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